A partir de 10 ansJeux inclassablesOn teste !

Test – Clip Cut Parcs

« Jean-Théodore, cesse de courir après ce chien ! Jean-Théodore, ce n’est pas le nôtre ! Jean-Théo… »

Vous continuez à pester contre ce gamin décidément bien inconscient tandis qu’il disparaît derrière un petit chapiteau blanc et rouge. Et d’ailleurs, qu’est-ce qu’il fait là, ce chapiteau ? Dans votre imaginaire bien réglé à vous, dans un parc, il y a des arbres, des chemins à angles droits et puis c’est tout. Qui a bien pu penser l’aménagement de ce parc ? Vous ronchonnez encore et vous dites que si c’était vous, hein, ça serait différent. Plus… carré, oui, voilà.

[Cet article a précédemment été publié sur plateaumarmots.fr, en voici une version mise à jour pour Plateau Junior.]

Bon, et si, justement, on vous proposait d’aménager vos propres parcs ? Mais attention, pas n’importe comment ! Avec des dés et avec des feuilles de papier. Ah ? Le concept vous est familier ?

Lancer des dés, écrire sur des feuilles, oui ça y est, vous maîtrisez depuis un moment les fameux Roll & Write, ces jeux dont la tendance a été vraiment popularisée par l’excellent Welcome To (qui est un Flip & Write, d’ailleurs, mais on ne va pas non plus chipoter, ça ferait prétentieux). On a même vu le genre s’ouvrir aux Marmots, car après tout, pourquoi pas, tout le monde après, disons 3/4 ans, sait lancer un dé et faire un dessin. Et vous êtes soit super fan du genre, comme votre serviteuse, soit vous en avez trop vus, et c’est ok aussi. Mais voilà que Renegade et Origames viennent titiller votre adultitude blasée ou votre enthousiasme débordant avec le premier Roll & Cut, qui plus est jouable avec vos marmots. Roll and quoi ? Cut, comme avec des ciseaux, oui oui ma bonne dame, oui oui mon bon monsieur.

Allons donc détailler un peu cela.

Clip Cut Parcs est un jeu sorti de la tête de Shaun Graham et Scott Huntington, illustré par Cold Castle Studio, édité par Renegade et localisé par chez nous par Origames. Le jeu est donné pour 1 à 4 découpeurs à partir de 8 ans, pour des parties de 30 minutes.

Ok, c’est très bien tout ça, mais on trouve quoi dans la boîte ?

Un dé, déjà, parce qu’un Roll & Cut sans rien à lancer, on risque quand même de s’ennuyer à mourir. Et puis des ciseaux, car oui, le jeu a le bon goût de vous offrir tout le matériel nécessaire à vos parties. D’ailleurs, pour le quart d’heure régressif, ce sont de petites paires de ciseaux d’écolier à bout rond, de couleurs différentes, comme quand vous étiez petits et que vous aviez les mêmes dans votre trousse Hello Kitty ou Pokémon, à côté de l’effaceur et de la colle UHU. Calibrés pour des petites mains d’enfants mais qui passent aussi dans de grosses mains poilues d’adultes. Car oui, ce jeu a aussi été testé en conditions extrêmes.

Quelques jetons, un paquet de cartes assez épaisses de format standard et un gros bloc de feuilles composées de petits carrés de couleur complètent l’ensemble. Pour une fois, la taille de la boîte est plutôt correcte par rapport à son contenu, ce qui est franchement chouette pour la planète et pour l’encombrement de nos ludothèques.

Côté illustrations, par contre, on ne va pas se mentir, c’est… fonctionnel. Voilà, oui. En dehors du couvercle de la boîte où le plus gros effort artistique a été fait, le matériel a pour pur objectif d’être lisible. Donc bon, il ne faut pas trop rechercher d’immersion là-dedans, le thème du jeu (développement urbain et construction de parcs) est quand même assez anecdotique.

Des p’tits trous, des p’tits trous, encore des p’tits trous…

Dans Clip Cut Parcs, comme je vous le disais, vous allez devoir découper pour construire vos parcs.

La mise en place dure environ 43 secondes : attrapez une paire de ciseaux et une des feuilles du bloc (qui ont le bout goût de présenter plusieurs designs différents). Prenez ensuite x cartes objectifs parmi les deux paquets de difficulté différentes, et suivant la durée de partie que vous visez. La règle mentionne 5 parcs par joueur mais rien ne vous empêche d’en prendre plus ou moins suivant vos envies. Vous en révélez deux faces ouvertes, ce seront vos deux parcs de départ.

Chaque carte représente une forme faite d’une succession de petits carrés, colorés ou non, avec un symbole ou non, reliés par des ponts ou non. En fait, cette iconographie est hyper intuitive. On comprend rapidement qu’on va devoir recouvrir les carrés par des carrés découpés de nos feuilles pour finir le parc. Là où les carrés des cartes sont blancs, on met ce qu’on veut. Là où il y a de la couleur, on doit mettre un carré de cette même couleur. Là où il y un symbole, il faut recouvrir par un carré présentant le même symbole et là où il y a un pont entre plusieurs carrés, le morceau de papier qui va recouvrir devra être d’un seul tenant. En bas de chaque carte, un petit bonus éventuel pour quand vous aurez fini le parc : un jeton pelle ou symbole, ou la possibilité de donner des coups de ciseaux supplémentaires.

Et le dé dans tout ça ? Eh bien, le dé va déterminer combien de coups de ciseaux et de quelle taille les joueurs vont pouvoir faire. Chaque face du dé représente 1 à 4 nombres indiquant les tailles des découpes. Exemple : 4 fois le nombre 1 signifie que tous les joueurs devront découper 4 fois des segments de taille 1 carré. Il y a bien sûr des contraintes supplémentaires dans la découpe, comme le fait qu’on ne peut pas combiner deux découpes du même tour pour en faire une plus longue. Car on voit venir d’ici les petits malins qui voudront faire de deux segments de taille 1 un segment de taille 2 dans le même tour. Non, ce n’est pas autorisé. Et il faut découper suivant les traits, aussi. Et pour les gens peu doués comme moi, ce n’est pas si simple, mais on y arrive.

Petit détail supplémentaire, chaque morceau de papier qui quitte la feuille principale doit immédiatement prendre une place sur un parc, sinon on le chiffonne et on ne peut plus jamais s’en servir. Et les petites boulettes de papier servant à départager les égalités, on ne veut pas en avoir trop.

Les jetons que vous récupérez en finissant votre parc vous permettront de vous affranchir des contraintes de symboles ou de couleur pour vos prochaines découpes.

Dès qu’un parc est fini, vous en dévoilez un autre et la partie s’arrête lorsqu’un joueur a fini tous ses parcs. En cas d’égalité, c’est le nombre de petites boulettes de papier qui départage les gagnants, et s’il y a encore égalité, la victoire va à celui qui a la bande de papier la plus longue sur un parc. Prime à la difficulté de faire de longs segments.

Des trous d’première classe ?

Calibré pour un format court et léger, Clip Cut Parks tient bien ses promesses : on découpe consciencieusement ses petites bandes de papier, on se triture les méninges gentiment pour parer à tous les tirages de dés. Aucune interaction entre les joueurs, aucun sentiment d’injustice, aucun besoin de mémoire ou de rapidité, la seule différence tient dans la façon dont vous allez découper vos bandelettes. Ce qui en fait un excellent candidat pour une session familiale de 8 à 28000 ans. Sous réserve, bien sûr, que les aspirants promoteurs arrivent à bien manier les ciseaux.

Alors, certes, au début peut-être, Junior aura quelques difficultés à estimer le bon emplacement pour ses découpes, car cela demande d’anticiper et d’avoir une bonne représentation dans l’espace. Mais, assez rapidement, il pourra jouer à armes égales contre les grands, car la courbe d’apprentissage du jeu est assez rapide et il n’y a pas vraiment de côté punitif. Même le fait de produire moultes boulettes n’est pas gênant car ce n’est qu’un moyen de résoudre les égalités. Bien sûr, si Junior découpe sa feuille en deux, là, par contre, le reste de la partie va être compliqué. Donc, en l’état, malgré les indications 8+ sur la boîte, nous pensons que pour pouvoir gagner contre un adulte, le marmot devrait plutôt avoir 9-10 ans. Mais heureusement, il y a un moyen de pallier à cela !

Sans modification, le jeu est très équilibré et souvent les joueurs de force similaire finissent en même temps, la détermination du vainqueur se faisant alors bien souvent au plus grand segment (car même nombre de boulettes). Néanmoins, si la différence de niveau entre votre petit piou et votre grand piou ou vous, était trop forte, vous pouvez la moduler grâce aux grands parcs. Chiche. Ce qui rend le jeu jouable et gagnable pour différents âges.

Et pour les grands, rien ne vaut le plaisir de retomber en enfance, quand on devait découper suivant les traits.

Quant au nombre de joueurs, si vous avez des ciseaux en rab, la seule limite est finalement de pouvoir distribuer assez de cartes parcs pour tout le monde. Le nombre de joueurs est donc tout à fait extensible et ne rallongera pas la durée des parties.

Dans tous les cas, vu la simplicité des règles, il sera probablement possible de laisser des enfants de 9/10 ans jouer ensemble, sous la surveillance habituelle d’un adulte dès lors qu’il s’agit de manier des ciseaux. Le jeu ne se prête pas à une ambiance de folie et ne devrait pas exciter vos marmots, que vous verrez alors plutôt concentrés, la langue sortie, tentant de découper au mieux leurs petites parcelles. A voir maintenant si le côté calme est envisageable pour vos marmots, mais ça, ça dépend tellement des enfants qu’on ne peut pas dire à l’avance. Nous n’avons pas pu tester le jeu dans ces conditions extrêmes, nous laissons donc la question ouverte, mais il nous paraît être un bon candidat. Cela dit, encore une fois, si vous voulez entendre de grands cris d’excitation, ce n’est pas le bon jeu.

Des trous d’seconde classe…

Petit point dommage, vu que tout repose sur la couleur des carrés et que la différenciation des designs est très légère et petite si on supprime les couleurs, il sera peut-être très difficile pour les daltoniens de jouer au jeu, malgré la petite feuille de référence vraiment sympa à leur attention au début du livret de règles. N’ayant pas de daltonien dans mon entourage, je ne peux pas non plus me prononcer sur le sujet, mais je préfère vous prévenir.

Autre petit point dommage, totalement inhérent au principe du jeu, il vous faudra jeter vos feuilles après chaque partie, ce qui en fait un jeu, par nature, jetable. On aurait aimé pouvoir trouver facilement des fichiers pour réimprimer (en couleur) des feuilles à découper, si nous étions venus à bout des 100 feuilles du livret. Une petite recherche rapide sur l’internet des choses ne nous a pas permis de trouver ces fichiers, juste des blocs à racheter sur le site US. Ceci viendra peut-être avec la sortie FR du jeu, si les petits gars d’Origames me lisent, <clin d’œil>.

Dernier petit point dommage, c’est toujours le même jeu. Oui, les parties varieront peu de l’une à l’autre sauf si vous modulez leur difficulté avec les cartes Grands Parcs. Ce qui fait que vous n’en enchaînerez pas non plus 10000, sauf si Jean-Théodore insiste très très fort, car on sait que les enfants aiment refaire les mêmes choses trop de fois. Donc risque d’overdose du jeu. Sauf que vous pourrez toujours le planquer ranger et y revenir plus tard avec plaisir, et que vous replonger dans les règles ne demandera pas un gros investissement.

Des p’tits trous, des p’tits trous, toujours des p’tits trous !

Intergénérationnel, au thème résolument neutre, Clip Cut Parcs est l’un des rares jeux à proposer le plaisir régressif de jouer avec sa matière et à permettre aux joueurs de se battre à armes égales. Son nombre de joueurs, sa durée et sa difficulté élastiques en font le jeu idéal à sortir pendant une réunion de famille calme, pour faire jouer jeunes et moins jeunes avec vous.

L’originalité du jeu, son accessibilité et son prix contenu font qu’il serait dommage de s’en priver. Alors, certes, on n’enchaînera pas 12 parties de Clip Cut Parcs d’affilée, et d’ailleurs, c’est vrai pour la plupart des jeux. Mais on pourra le ressortir régulièrement à la demande des petits ou des grands, le « jeu des ciseaux ».

Mais, vraiment, vraiment, encore une fois, ce que l’on aime très très fort dans Clip Cut Parcs, c’est que tout le monde, ou presque, peut y jouer ensemble. Et ça, c’est suffisamment rare pour être encore une fois répété !

On aime

  • Le prix tout doux
  • Le côté intergénérationnel
  • La durée, la difficulté et le nombre de joueurs modulables

On aime moins

  • Ne pas trouver de fichier pour réimprimer des feuilles à bas coûts
  • Le thème plaqué dont les dessins auraient pu être plus typés pour les daltoniens
  • La répétabilité potentielle du jeu, à consommer avec modération et modulation

Le trouver

Fiche Technique

  • Un jeu de Shaun Graham et Scott Huntington
  • Illustré par Cold Castle Studio
  • Edité par Origames/Renegade France
  • Pour 1 à 4 joueurs
  • A partir de 8 ans.

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